C'est quoi le pitch? Un petit garçon raconte l'histoire de ses parents, l'amour exclusif qu'ils se portent, et ces parenthèses où il les voyait danser sur "Mr Bojangles" de Nina Simone. Le père attribuait chaque jour un nouveau nom à sa femme, qui se délectait de ses multiples identitées. Jusqu'à se perdre et ne plus savoir qui il est. 

L'histoire d'une douce et dramatique folie. Nous sommes tous dotés d'un petit grain de folie, c'est ce qui nous rend unique et nous donne ce petit plus de notre personnalité, qui nous détache des autres. Ça n'a jamais été un mal tant que la folie reste moindre et sous contrôle. Elle rend nos vies moins ennuyeuse, pour reprendre un peu la citation notées sous la dédicace, de Charles Bukowski, qui illustre parfaitement le sujet de ce roman. Sauf qu'à être trop original, trop excentrique, trop éloigné de la réalité, cela peut devenir dangereux. La mère, qui a toujours été un peu loufoque, sombre peu à peu dans une folie proche de la bipolarité ou de la schizophrénie. Son mari et son fils ne peuvent que le constater lorsqu'elle met le feu à l'appartement. Impuissants, ils doivent se rendre à l'évidence et admettre que quelque chose ne va pas. 

L'amour plus fort que la déraison. La mère est internée, un crève-coeur pour son mari et son fils, qui, quelque part, sont rattrapés par cette folie, ou bien refusent de la voir, aveuglés par l'amour qu'ils portent à cette femme tantôt fantasque, tantôt contrôlée par ses démons. Ils sont prêts à tout pour la libérer et revenir en arrière, au bon vieux temps, où ils écoutaient ce morceau de Nina Simone, en toute insouciance. 

Roman de l'amour fou vertigineux ou l'incrédulité et le déni des proches à reconnaître la folie? Ce roman m'a beaucoup plu. Choisir le petit garçon comme narrateur donne un côté moins tragique au drame qui se noue, une certaine naïveté face à une vérité de plus en plus évidente. L'amour peut nous faire perdre pied. Ici, la mère souhaitait passer ses jours et ses nuits avec son mari, hors de question qu'il travaille, elle le voulait près d'elle. Pour le vivre en ce moment même, je sais qu'être en couple implique une certaine ouverture, un ancrage dans le monde réel, pour ne pas devenir fou d'amour. Le père ne supporte pas cette situation, il est totalement dans le déni. Une part de lui veut encore croire que la femme dont il est tombé amoureux n'a pas changé. Sauf que la terrible réalité finit toujours par nous rattraper. 

 

  • En attendant Bojangles, Olivier Bourdeaut, éditions Finitude (2015)

 

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