C'est quoi le pitch? Joseph Ponthus raconte comment il s'est retrouvé à travailler comme ouvrier intérimaire, à la chaîne, dans une usine de poissons puis dans un abattoir, en attendant un poste dans le secteur pour lequel il a fait de longues études. 

Mon avis :

Décédé fin février à 42 ans, Joseph Ponthus aura marqué la littérature avec cet unique roman, récompensé en 2019 par le Grand Prix RTL-Lire. 

Pourquoi? Pour son côté atypique. L'écriture est rageuse, ravageuse, revendicatrice, sans ponctuation, juste une mise en page pouvant évoquer quelque chose de poétique, malgré ce qui est déclamé, avec emphase. 

Pour son témoignage contemporain sur les conditions difficiles du travail à la chaîne. Une pénibilité physique qui peu entamer peu à peu le moral, à force de répéter quotidiennement les mêmes gestes. Ou comment mettre les pieds dans le monde du travail où il faut suer, trimer pour gagner de quoi vivre un minimum. 

Pour son parcours enfin, car Joseph a fait de longues études et, par amour, décide de suivre sa compagne en Bretagne. Sauf que là-bas, aucun boulot ne l'y attend, alors faute de mieux, il prend ce job qui, il l'espère, ne durera pas trop longtemps. A travers ces lignes, on y voit un homme cultivé qui décrit un monde dans lequel il n'avait pas pensé atterrir un jour. Chaque tâche est répétitive, monotone, et ne lui apporte aucun épanouissement. Il ne se plaint pas non plus, pas du tout, mais espère toujours des lendemains meilleurs qui tardent à venir. Au final, son "vrai" job, celui pour lequel il se destinait, il ne l'exerce qu'un mois et demi dans l'année, soit un travail saisonnier en somme. 

Pour avoir fait de la plonge en restauration pendant huit mois, en attendant le poste providentiel et tant convoité en bibliothèque, je m'identifiais plutôt bien à ce témoignage. On travaille oui, on met un peu de beurre dans les épinards, mais on espère surtout être ailleurs, le plus vite possible. Ce boulot m'a apporté des choses malgré tout et je ne le renie pas, mais il y a des jours où on se demande pourquoi on a fait toutes ces études pour, finalement, vider des plateaux et faire la vaisselle. J'ai beau dire qu'il n'y a pas de sous-métier... Faire ce genre de mission en intérim remet un peu les idées en place et les pieds sur terre pour ceux qui "s'y voyaient déjà". L'entrée dans le monde du travail peut s'avérer déroutante ... 

Je pensais m'ennuyer en lisant ce livre écrit comme un recueil de poèmes, à propos du travail à l'usine. Mais ces feuillets sont un précieux témoignage que l'auteur veut faire connaître à tous ceux qui n'y ont jamais mis les pieds, mais aussi pour tous ceux qui y travaillent, nuit et jour, au prix de leur santé. 

  • A la ligne, Joseph Ponthus, éditions La Table Ronde (2019)
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