D'après une histoire vraie

C'est quoi le pitch? Après la publication de son roman consacré à sa mère bipolaire, Delphine raconte les conséquences que cette histoire a eu sur sa propre vie : le syndrome de la page blanche. Et sa rencontre avec L., une femme de son âge rencontrée lors d'une soirée, va la tirer inexorablement vers le bas...

Mon avis : Tout simplement : renversant. Pas dans le sens drôle, plutôt comme si cette lecture m'avait complètement retournée le cerveau. Pas dans un sens négatif non plus, hein. C'est percutant, voilà. Dès qu'on plonge dans ce roman, impossible d'en ressortir, on a envie de savoir comment ça se termine.

Une fois le livre refermé, de nombreuses questions sans réponses se bousculaient dans ma tête, dont la principale : mais cette histoire, est-elle vraie? Delphine De Vigan a-t-elle vraiment rencontré cette femme qui l'a coupée de tout, au point de l'empoisonner? A-t-elle vraiment eu un rejet quant à son métier (impossible pour elle d'écrire sur une feuille de papier ou sur un document Word)? Ou bien tout ceci est-il tiré de plusieurs histoires? Quelle est la part de vérité? Tout le roman tourne autour de ça, du contenu d'un livre? Qu'est-ce que les lecteurs attendent d'un livre? Une histoire totalement inventée, avec une intrigue farfelue et irréelle ou bien du vécu?

Pour L., du réel, de l'authentique. L., un personnage trouble, auquel j'avais du mal à donner de la consistance, parce qu'au final, a-t-elle vraiment existé? Personne à part Delphine ne l'a rencontrée. Ma théorie, c'est que L. était un ami imaginaire, ou alors la deuxième Delphine (puisque physiquement, elles avaient un air de ressemblance), ce qui reviendrait à dire qu'elle souffrirait de dédoublement de la personnalité, comme sa défunte mère.

Bref, on plonge en eaux troubles, une certaine tension émane de ce roman, j'avais l'impression d'être dans un de ces films où une personne fait connaissance avec ses voisins, qui peu à peu envahissent notre vie et la rendent impossible, ou genre "La main sur le berceau" ou "Liaison Fatale", "Basic Instinct". Progressivement, cette personne s'impose, a une emprise, et jalouse et possessive, sort les griffes pour protéger son ami(e) ou bien-aimé(e).

Et puis, il y a ces lettres dactylographiées, des lettres virulentes, menaçantes, où une personne proche d'elle, ou du moins faisant partie de sa famille, lui écrit les pires horreurs et lui reproche le livre écrit sur sa mère. Pareil, en admettant que L. existait bel et bien, elle était peut-être l'auteure de ces lettres.

La frontière entre fiction et réalité est floue, gommée, de façon à ce qu'on se sente désarçonné, incapable de différencier le faux du vrai.

Lauréat du Prix Renaudot et du Prix Goncourt des Lycéens l'an dernier, ce roman est incontournable. Si vous n'êtes pas trop attiré par les romans un peu angoissant, où vous ressentirez une tension palpable, ne vous forcez pas, ou lisez-le à petites doses. Mais j'adore ce genre de livres qui vous amène à réfléchir, à vous poser une multitude de questions que vous aimeriez poser à Delphine De Vigan. J'avais déjà apprécié "No et moi" et "Rien ne s'oppose à la nuit". C'est une certitude, Delphine de Vigan est une auteure sur laquelle il faut compter aujourd'hui.

  • D'après une histoire vraie, Delphine De Vigan, éditions JC Lattès.
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